Césarion d'Alexandrie

Césarion d'Alexandrie

Etre, ou ne pas être

 

 

 

Comme sont malheureux tous ces petits soldats,

Privés d’air au fond d’eux comme au loin de lumière :

On les lève à grands cris, on les livre aux combats,

Fouettés de doctrine ; on les voue à l’ornière !

 

Que leur étoile brille, ils ont l’œil du captif

Qui doute de son droit devant la porte ouverte,

Et se montre si gauche, à ce point émotif,

Qu’il fait sonner enfin la cloche de l’Alerte ;

 

Vite les revoilà dans les rangs du troupeau,

Soumis à ses devoirs ainsi qu’à sa pitance,

Tièdes au petit jour, raides sous le drapeau,

Attendant du pouvoir ses ors comme leur chance.

 

Sommés d’agir, encor, toujours, de lutter,

Au nom de quelque cause altière, intransigeante,

Prétendument urgente et qui veut les hanter,

Le lumineux silence, hélas, les épouvante.

 

Cette présence à soi, dans le secret des dieux,

Heureuse et souveraine et de bonté prodigue,

La révélation triomphante des cieux

Leur donne des sueurs, et contre elle les ligue.

 

Ils ne savent plus rien des rêves de la nuit !

Ni le jour qui s’y creuse, et ni l’aube irisée

Dont au bout il enfante, ainsi que du doux fruit

De sa profonde étreinte avec l’ombre apaisée.

 

Ils ont cloîtré leur âme au fond d’un noir cachot.

Mais les cimes au loin, recouvertes de neige

Invincible, sans bruit versent leur rayon chaud,

Et sur chacun, toujours, agit le sortilège.

 

Heureux le sage qui le cultive en son sein,

Féconde son passé de sa vive espérance :

Le temps n’a plus pour lui de limites, enfin !

Il est du devenir l’adamantine chance.

 

 

 

samedi 30 avril 2016

 



30/04/2016
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